
Mardi 25 novembre 2025 – 13 h à 16 h 30
Les changements climatiques altèrent profondément les dynamiques forestières, ce qui exige le développement d’approches sylvicoles novatrices pour mieux adapter nos forêts aux conditions émergentes. Ce rendez-vous mettra en lumière plusieurs initiatives de recherche menées dans l’est du Canada sur la migration assistée d’espèces forestières. Cette stratégie sylvicole d’adaptation vise à reboiser avec des semis d’essences ou de provenances méridionales dans des zones où les conditions climatiques futures leur seraient favorables. Comment ces initiatives peuvent-elles aider les aménagistes à adapter leurs pratiques de gestion forestière? Quels critères guident le choix des essences et des sites? Comment cette stratégie peut-elle s’intégrer à l’échelle du paysage? Voilà quelques questions qui seront abordées lors de l’activité.
13 h Ouverture
Conférencier et conférencière : Samuel Lauzon, agent de transfert de connaissances scientifiques forestières, et Catherine Larouche, cheffe du Service de la sylviculture et du rendement des forêts, Direction de la recherche forestière (DRF), ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF)
13 h 10 Le réseau DREAM et les résultats initiaux du dispositif du Lac-des-Amanites, réserve faunique de Portneuf
Conférencières et conférencier : Patricia Raymond, Emilie Champagne et Daniel Dumais, Direction de la recherche forestière (DRF), ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF)
La migration assistée forestière (MAF), soit le déplacement d’espèces et de populations du sud vers le nord, compte parmi les outils sylvicoles d'adaptation aux changements globaux. Le réseau DREAM (Desired Regeneration through Assisted Migration) vise à développer des scénarios sylvicoles pour la MAF. Au Québec, il comprend quatre dispositifs expérimentaux, dont celui établi en 2018 dans la réserve faunique de Portneuf. Ce premier dispositif inclut neuf essences feuillues et résineuses plantées en mélange sous divers scénarios sylvicoles, dont la plantation en coupe partielle et en petite coupe totale. Pour chaque essence, nous avons sélectionné trois sources de semences (provenances) : analogues au climat actuel et à ceux projetés pour 2050 et 2080 pour le site d’étude. Cinq ans plus tard, 84 % des semis ont survécu. La coupe partielle s’est avérée utile en réduisant, notamment, les dommages causés par le gel tardif, et ce, avec un effet limité sur les performances écophysiologiques. En coupe totale, les trois espèces feuillues des analogues 2050 et 2080 ont subi un stress hydrique moindre, ce qui indique que la provenance locale tolère mieux la sécheresse. Les croissances en hauteur et en diamètre ont été similaires entre les provenances pour les déplacements de moins de 500 km. Les plants ont été capables de récupérer à la suite de perturbations abiotiques et biotiques. Peu de données sont disponibles sur la MAF et sa mise en œuvre. Notre étude propose des pistes de solution concrètes pour l'adaptation des forêts aux changements globaux.
14 h Le dispositif de migration assistée d’espèces forestières à la forêt d'enseignement et de recherche Simoncouche
Conférencier : Sergio Rossi, professeur titulaire au Département des sciences fondamentales, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)
Collaboratrices et collaborateur : Patricia Raymond (MRNF-DRF), Nita Dyola (UQAC) et Roberto Silvestro (UQAC)
Un tout nouveau dispositif de migration assistée d’espèces forestières a été réalisé à la forêt d'enseignement et de recherche Simoncouche. Le site, localisé à la limite du domaine de la sapinière à bouleau jaune, constitue la phase 2 du projet DREAM et représente le secteur le plus nordique du réseau de plantations. Un total de 2 400 plants forestiers, représentant cinq essences (érable à sucre, érable rouge, pin rouge, épinette rouge et pruche du Canada) ainsi que trois analogues climatiques, ont été mis en terre à l’automne 2024. Ils ont été répartis sur quatre blocs intégrant différents scénarios sylvicoles (coupe totale et coupe partielle) et des sous-parcelles où les cervidés sont exclus. La conférence portera sur les défis de réalisation du dispositif et les résultats de la première année d'observations.
14 h 30 Migration assistée dans le domaine bioclimatique de la sapinière à bouleau blanc : une approche multiéchelle
Conférencier : Mathieu Bouchard, professeur adjoint, Département des sciences du bois, Université Laval (ULaval)
Collaborateurs : Frédéric Poirier (ULaval), José-Gabriel Yee-Paré (ULaval) et Hugues Power (MRNF-DRF)
L'intégration de la migration assistée dans les stratégies d'aménagement forestier appelle à une réflexion qui se situe à deux échelles spatiales distinctes. Nous présentons les premiers résultats d'un projet visant à tester la mise en œuvre du concept de migration assistée dans la sapinière à bouleau blanc, en tenant compte de ces deux échelles. À l’échelle locale, la mise en place d'un dispositif DREAM à la forêt Montmorency permettra de tester la performance de plants de différentes provenances, soumis à plusieurs types de stress environnementaux. À une échelle plus large, correspondant à l'unité d'aménagement 037-72 (région de Québec), la réalisation d'un calcul de possibilité forestière intégrant l’effet des changements climatiques et différents objectifs d'aménagement (conservation de la biodiversité, acceptabilité sociale, approvisionnement des usines) indique qu'il est possible d'identifier plus précisément les situations où ces plantations devraient être réalisées en priorité. L’intégration des différentes échelles spatiales permet d’identifier des pistes de recherche prometteuses et peut contribuer à une mise en œuvre réfléchie et organisée de la migration assistée dans ce domaine bioclimatique.
15 h 15 Migration assistée « extrême » en milieu contrôlé : résultats préliminaires pour huit espèces de feuillus et de conifères
Conférencier : Loïc D'Orangeville, professeur agrégé, Département des sciences du bois et de la forêt, Université Laval (ULaval)
Collaboratrices et collaborateurs : Mackenzie Good (UNB), Rob Vaughn (RNCan), Christopher Wong (UNB), Anthony Taylor (UNB) et Wendy Monk (UNB)
Mesurer la capacité de nos populations à s’acclimater au climat futur est essentiel pour concevoir des stratégies de migration assistée qui ciblent les espèces vulnérables et les bonnes distances de transfert. Pour y parvenir, on doit évaluer plusieurs populations le long de larges gradients climatiques qui permettent de prévoir la résilience aux conditions extrêmes et d’anticiper des déclins de performance.
Le projet TransX est un nouveau réseau de 11 tests de provenance couvrant un large gradient climatique. Les arbres établis dans ce dispositif ont aussi été soumis depuis 2 ans à une expérience en serres de migration assistée où 40 provenances différentes de 8 essences ont subi un gradient de réchauffement allant jusqu'à +15 oC combiné à des traitements de sécheresse sévère.
Je vais présenter les premiers résultats de ces expériences sur la survie, la croissance, l'allocation en biomasse, la phénologie de croissance et l'activité photosynthétique. Ces résultats devraient nous permettre d'anticiper la réponse des arbres établis sur les dispositifs extérieurs.
15 h 45 Pins, chênes et ours curieux : la migration assistée dans le projet ASCC à la forêt expérimentale de Petawawa
Conférencier : Nelson Thiffault, chercheur scientifique, Service canadien des forêts, Ressources naturelles Canada (SCF-RNCan)
Collaborateurs : Trevor Jones (SCF-RNCan), Michael Hoepting (SCF-RNCan) et Jeff Fera (SCF-RNCan)
Comment préparer nos forêts aux conditions climatiques de demain? À la forêt expérimentale de Petawawa, nous testons différentes stratégies sylvicoles dans le cadre du projet Adaptive Silviculture for Climate Change (ASCC). Le cœur de cette expérience repose sur la migration assistée : planter aujourd’hui des semis issus de régions plus chaudes et sèches pour voir s’ils seront mieux adaptés aux climats futurs prévus pour cette région de l'Ontario. Concrètement, nous avons installé un dispositif expérimental de 212 hectares où nous comparons cinq stratégies d'adaptation, allant de l’inaction à la transition vers de nouvelles essences comme le pin rigide, en passant par des approches de résistance (maintenir la composition actuelle), de résilience (favoriser la diversité pour rebondir après perturbation) et de transition (accompagner activement le changement). Plus de 170 000 semis et glands provenant de différentes provenances locales ou régionales, et même certaines de régions plus lointaines comme la Virginie ou l’Iowa, ont été plantés, et près de 20 000 sont suivis individuellement. Nous observons non seulement leur survie et leur croissance, mais aussi les effets sur la biodiversité, le sol, les risques de feu et la faune. Cette expérience à grande échelle, menée dans le cadre d’un réseau nord-américain, offre un aperçu concret des possibilités et des défis liés à la migration assistée pour maintenir des forêts productives et durables face aux changements climatiques.
16 h 15 Synthèse de la rencontre
Conférencière : Alison Munson, professeure associée, Université Laval
* Les heures sont données à titre indicatif seulement. Des périodes de questions et une pause sont également prévues et peuvent varier selon le déroulement de la rencontre.
* Le contenu des présentations des conférenciers et des conférencières n’engage qu’eux et qu’elles. Vous aurez ici accès à leurs présentations et aux enregistrements des conférences à la suite de l’activité.